La trame en imprimerie

Pour honorer le nom de ce blog, voici une série d’articles sur la trame d’imprimerie qui commencera sur ses caractéristiques générales et qui sera complétée, au fil du temps, par l’étude des différents types de trames.

Pourquoi une trame en imprimerie ?

D’abord quelques rappels. Si vous vous intéressez à ce poste, vous connaissez sûrement les rudiments de l’imprimerie à savoir qu’elle reproduit les couleurs en se basant sur les 3 primaires soustractives (Cyan, Magenta, Jaune) accompagnée du Noir pour des économies d’encre (car on imprime beaucoup de texte en noir). Nos premières expériences avec la peinture nous apprennent que toutes les couleurs sont la résultante d’un savant dosage de ces 3 primaires. En aquarelle par exemple, un mélange avec les bonnes proportions de Cyan et de Magenta va pouvoir nous donner une belle palette de bleus. Ensuite pour éclaircir ces couleurs, rien de plus simple, il suffit de rajouter de l’eau et on en obtient de nouvelles.

En définitive, en synthèse soustractive, ce qui fait varier la couleur c’est la concentration (donc la dilution) de chaque primaire qui constitue le mélange.

Cela pose deux problèmes à l’imprimeur :

  • Comment diluer les primaires ?
  • Comment mélanger les encres ?

Sur un procédé industriel, où la cadence impose des vitesses supérieures à 15 000 feuilles/heures (pour du labeur), quelle solution l’imprimeur a-t-il pour diluer ses primaires ?

Il pourrait s’inspirer du peintre et de ses dilutions, mais techniquement on ne sait pas faire varier localement la concentration des encres à de grandes cadences (tout du moins pour le moment!). Comme il ne peut pas diluer physiquement son encre, l’imprimeur à trouver une parade en la diluant « optiquement ».

Exemple simple, vous voulez éclaircir votre cyan de 50%. En peinture, on diluera de moitié la concentration des pigments avec le solvant et on appliquera le mélange au pinceau. En imprimerie, on va s’arranger à imprimer seulement 50% de la surface de papier avec le cyan de base et pour que l’illusion d’optique fonctionne, on réparti des points d’encre un peu partout sur la surface. L’imprimeur a donc créé LA TRAME pour contrôler la répartition de ces points d’encre. Cette astuce repose sur ce que l’on appelle le pouvoir de séparation de l’oeil humain. Si, à une distance d’observation donnée deux points sont suffisamment rapprochés, alors l’oeil pourra les confondre et en fera leur moyenne. Voici un exemple qui illustre bien la manière d’obtenir du gris avec une trame.

Utilisation du tramé pour rendre du gris

Figure 1 - Zoom sur un texte gris qui est en fait composé d'une trame de point noirs.

Pour le mélange des encres c’est là encore une question d’optique. L’imprimeur ne mélange pas, il dépose des couches d’encre (une pour chaque primaire + le noir). Ce sont alors les lois de l’absorbance des couleurs qui font leur travail. Les couches agissant comme des filtres à lumière, si vous déposer une couche de magenta sur une couche de jaune, vous obtiendrez du rouge.

Superposition d'aplats jaune et magenta

Figure 2 - Zoom sur la couleur rouge d'un imprimé qui est en fait composé d'une couche de magenta sur une couche de jaune (un petit décalage du registre nous permet de voir apparaître les deux aplats)

Les caractéristiques générales d’une trame

Le point de trame

La forme et la taille des points de trame sont deux variables qui permettent de construire une multitude de type de trame. Ainsi, il est possible d’en construire avec des points ronds, carrés, elliptiques, composites, en cercles concentriques ou en utilisant n’importe quel motif.

La position des points

C’est là où l’on distingue les deux grandes familles de trames utilisées en imprimerie. Il s’agit de la méthode pour répartir les points de trame sur la surface imprimée. Elle peut être soit fixe dans le cas de la trame conventionnelle, soit aléatoire pour les trames dites stochastiques.

La linéature

La linéature de la trame mesure l’espacement entre deux lignes de points. Elle s’exprime en lpi (Lines Per Inch) et indique la quantité de lignes sur une longueur de 1 pouce (2,54 cm). On l’utilise pour mesurer la finesse de la trame. En trame conventionnelle, plus la linéature est élevée, plus les lignes seront rapprochées et les points seront petits. Cette dernière est choisie en fonction du papier, du procédé d’impression et de la qualité attendue.

Voici, à titre indicatif, les différents ordres de grandeurs utilisés classiquement en imprimerie :

Tableau 1 – Les linéatures couramment utilisées en imprimerie. Elles dépendent du papier, du procédé et de la qualité souhaitée.
Type d’impression (papier) Linéature (lpi)
Sérigraphie 35-65
Imprimante laser (papier non couché) 50-90
Imprimante laser (papier couché) 75-110
Offset Coldset (papier journal) 60-100
Offset (papier non couché) 85-175
Offset (papier couché) 120-200
Offset haute qualité, héliogravure 150-300

La linéature définit la taille des zones élémentaires de l’image qui seront échantillonnées par le RIP et transformée en points. Pour éviter des pertes d’information, elle doit donc avoir une valeur inférieure ou égale à la résolution de l’image à imprimer (Cf l’article : Différence entre DPI et LPI). La quantité de lignes observées sur une distance de 1 pouce n’est que la résultante du réglage du RIP avec la linéature. Voilà pourquoi, pour les trames aléatoires, la notion de linéature s’applique toujours malgré l’absence de lignes de points. Dans ce cas particulier, la finesse de l’impression dépend aussi de la taille du point utilisé.

Les types de trame

Trames à modulation d’amplitude (AM)

C’est la technologie la plus utilisée aujourd’hui. On l’appelle d’ailleurs « trame classique » ou « trame conventionnelle ». La position des points de trame est fixe, seule la taille de ses derniers varie.

Trames à modulation de fréquence (FM)

Aussi appelée trame aléatoire, trame stochastique et parfois trame à diffusion d’erreur. Ici c’est la taille des points qui est fixée et leur position ainsi que leur quantité (fréquence) qui varient.

Trames hybrides

La technologie des trames hybrides est un mélange des trames FM et AM. Les caractéristiques sont propre à la société qui édite la technologie, c’est pourquoi nous parleront directement des produits chez les marques.

Ce dossier est en travaux et sera complété au fil du temps.

___________________

Liens connexes :

  • Cours de Stuart Grais sur la linéature (eng).
  • Pour aller plus loin que l’imprimerie, je vous conseille la lecture de la page Wikipédia sur le tramage informatique.
  • Ce cours (pdf) très complet, d’Elisabeth Fays, sur la trame.

4 commentaires pour cet article.

  1. budea a dit :

    Bonjour,

    article très intéressant, petit complément en imprimerie nous pouvons monter aisément sur un couché en trame 175 – 200 et sur un offset en trame 150 – 175.

    • Vincent a dit :

      Bonjour,

      Merci pour votre retour.
      A la base, ces données sont issues du cours de Stuart Grais (Cf liens connexes), je les ai complétées en fonction de vos remarques. Il manque encore le jet d’encre ou la flexo par exemple…

      A titre d’information, sur votre process en 175 lpi sur du papier offset, la reproduction des (petits) points sur les tons clairs est-elle stable ?